Il est des vérités qu’on souhaite ne jamais approcher, des vérités qu’on préfère recaler au fond d’un tiroir, au fond d’une mémoire, d’une conscience ou d’un débarras.
Il est des vérités si lointaines de ma perception de l’humanité, de la bienveillance et de l’amour qu’elles viennent saigner en moi lorsque j’en découvre les pendants et les effets de manière plus concrète.
Il est des vérités qui font mal, tellement mal qu’elles ravagent des vies, brisent des destins, abîment des relations, sèment la mort.
L’inceste est de celles-là… de celles qu’on a préféré taire durant des générations de peur d’éveiller des soupçons de médisance et des reproches, de peur de paraître peu recommandables aux yeux des villageois ou des voisins. L’inceste, « ce tueur en série » qui a rendu muets tant d’enfants, qui a amoché tant d’enfances…
A l’heure des hashtag meetoo et balancetonporc, il manquait la voix de celles et ceux dont l’urgence est de dénoncer l’innommable imposé par celles et ceux qui sont censé aimer et protéger. « Balancetonpère », « Ouvrelesyeuxmaman », « Nemetouchepascousin »…
Ces gens-là se fait la voix des victimes de ce fléau destructeur qui a gangrené tant de familles. Par sa plume pudique et claire, descriptive et empathique, Béatrice Riand relate les témoignages de celles et ceux qu’on a fait taire par tant de violence.
C’est un livre douloureux mais nécessaire.
Pour les victimes. Evidemment.
Pour les auteurs. Eventuellement.
Pour ceux qui n’ont pas voulu voir.
Pour ceux qui savaient mais qui se sont tus, trop lâches, trop abîmés par la vie ou par le poids des traditions pour réagir.
Pour ceux qui ont été épargnés dont je fais partie.
Ces gens-là, ce sont des témoignages bouleversants qui m’ont fait sentir une reconnaissance infinie envers mes parents, mes proches qui ont toujours eu les gestes adéquats, aimants et bienveillants envers moi, qui m’ont permis de grandir sereinement, épanouie et joyeuse.
J’ai apprécié que l’on donne la parole également à ceux dont la vie a été brisée par des rumeurs malveillantes d’inceste ainsi que l’éclairage d’Yves Gaudin pour tenter d’expliquer l’indicible.
Merci aux Editions Slatkine d’oser cette parole et de me l’avoir transmise et à Babelio par son opération Masse Critique pour ce livre percutant.